Cosmopolis
Revue de cosmopolitique
2018/1-2
Présentation
La Déclaration universelle des droits de l’humanité page fait suite à un rapport confié à Corinne Lepage en juin 2015 par le président de la République française François Hollande afin d’établir une proposition en ce sens. Déposée en septembre de la même année, cette proposition s’inscrit dans le cadre de la réunion des Etats-parties (près de 200) à la convention-cadre des Nations unies sur l’évolution du climat à Paris (COP21), conclue le 12 décembre 2015 par un accord sur la nécessité de restreindre le réchauffement du climat. La Déclaration vise à concevoir une nouvelle génération de droits imposée par l’état des écosystèmes et l’avenir de la Planète et de ses habitants. Elle innove à plusieurs égards, en soulignant notamment le fait que l’humanité est désormais sujet de droit et que la notion de patrimoine de l’humanité, présente dès le Mare Liberum de Grotius au dix-septième siècle, s’étend aujourd’hui aux biens culturels et naturels.
Spécialiste du droit international, Valérie Cabanes expose les principes juridiques, mais aussi sociopolitiques et scientifiques développés dans ses ouvrages Un nouveau Droit pour la Terre (Seuil, 2016) et Homo Natura (Buchet/Chastel, 2017). La biodiversité et le droit des générations futures suppose une nouvelle hiérarchie des normes qui tienne compte notamment des limitations à apporter à la souveraineté des Etats mais aussi aux pouvoirs des acteurs économiques, tout en appuyant le principe d’interdépendance qui lie l’ensemble des êtres vivants. L’auteure en appelle à une justice universelle qui reconnaisse à la nature autant qu’aux êtres humains le droit d’exister et de perdurer.
La notion de « crime contre l’humanité » reprise dans divers instruments internationaux est inséparable de la notion de « crime d’écocide », dont Fidel Jaramillo Paz y Miño, spécialiste de droit international et chercheur à la Fondation internationale Baltasar Garzón (FIBGAR), présente le cadre juridique et doctrinal élaboré depuis les débats des années 1970 jusqu’à l’émergence du concept à la fin du XXe siècle, à la faveur notamment des conférences internationales et des conventions qui s’y rapportent. Si le terme semble récent, l’auteur montre que la notion est restée occultée avant d’être conceptualisée, au-delà des divergences d’interprétation.
Virginie Langlois entreprend une réflexion philosophique sur le fonctionnement quantique des mécanismes du réel. La conception qui s’en dégage relativise certains concepts comme celui du temps, généralement considéré à l’image d’une flèche fixe et homogène. De même, la notion de qui s’y rattache s’en trouve transformée, à la lumière notamment des phénomènes de synchronicité, dont les rouages logiques révèlent une mécanique du réel qui déborde les conceptions habituelles et interroge simultanément science, philosophie et spiritualité.
Les deux articles qui suivent abordent, au sujet des mêmes questions, les initiatives et réflexions récentes des acteurs de la société civile.
Le premier, sous la plume de Joan Cocks, parcourt l’étude récente de Paul Raskin, Journey to Earthland. The Great Transition to Planetary Civilization, publiée à Cambridge (Massachussetts) par l’Institut Tellus, retrace diverses initiatives visant à renverser le désespoir des esprits progressistes confrontés aux réalités dystopiques de l’époque, en se projetant au-delà de la défaite des utopies dans la prospective nourrie des mouvements citoyens mondialistes (Global Citizens Movement) en vue forger un avenir plus équitable sur le plan social, plus accueillant à la vie culturelle et plus respectueux de l’écologie planétaire.
Le deuxième, sous la plus de Joan Newhouse, présente les recherches entreprises de longue date par le Centre Johns Hopkins d’étude de la société civile (Johns Hopkins Center for Civil Society Studies) à la faveur de l’ouvrage Explaining Civil Society Development: A Social Origins Approach, qui réunit dans une perspective comparée les études de Lester M. Salamon, S. Wojciech Sokolowski, Megan A. Haddock et autres auteurs. Le thème central, comme l’indique le titre, est celui de la portée et de la structure sociale du secteur à but non lucratif, identifié ici à la société civile, dans plus de quarante pays. L’ensemble exploite de nouvelles données dans le but de vérifier certaines théories relatives à des questions non résolues du domaine concerné.
Paul Ghils