Cosmopolis

A Journal of Cosmopolitics

Revue de cosmopolitique

 

Editorial

 

 

La visée cosmopolitique n’a cessé d’évoluer depuis ses fondements antiques. Giuseppe Giliberti revient sur la philosophie cynique-stoïcienne de Sénèque du début de notre ère, et souligne le caractère idéologique de propositions juridiques qui, chez les Romains, établissent une dichotomie des droits individuels entre liberté et esclavage. Celui-ci contredit le ius naturale et est incompatible avec les nécessités d’un empire cosmopolitique qui s’étendait sur une grande partie du monde connu.

 Haider A. Khan s’interroge sur ce que pourrait être une architecture financière mondiale appropriée pour le « Sud global » dans un cadre cosmopolitique, sachant qu’il devrait s’agir d’un accord financier équitable. Il explore les possibilités d’une nouvelle architecture financière mondiale adaptée aux évolutions des nouvelles institutions parmi des idées, des normes et des politiques concurrentes.

Elly Hermon aborde la thématique paix-guerre dans la perspective d’une étude multi-dimensionnelle et mondialisée qui affecte l’ordre international et interculturel à l’heure où l’histoire de l’humanité s’engage pour la première fois vers une civilisation planétaire. Il accorde une attention particulière à la dimension historique, entre historiographie et philosophie de l’histoire.

Si le Nigeria est le pays le plus peuplé et la première économie d’Afrique, François Misser nous apprend que ce pays a l’indice de criminalité le plus élevé du continent tout en développant de nouvelles formes de criminalité, de la cybercriminalité au terrorisme djihadiste, du trafic des personnes à la piraterie maritime. Les conflits entre gangs concurrents ne font qu’aggraver la situation.

Raffaele Morgantini retrace le processus qui conduisit  à l’adoption par l’ONU du premier cadre juridique des droits des paysans, dont dépend la souveraineté alimentaire dans le droit international. Il en présente les contenus fondamentaux et explore les enjeux principaux de sa mise en œuvre.

Jérôme Bondu explore les techniques et les vecteurs de la guerre cognitive, qui n’est pas neuve mais dont les techniques numérisées en renouvellent les ressorts psychologiques, informationnels, réticulaires et géopolitiques. Leurs enjeux requièrent de nouvelles formes de collaboration internationale pour en maîtriser les effets réels ou potentiels.

Ndubuisi Idejiora-Kalu analyse les problèmes posés en ingénierie par la science des systèmes et la complexité croissante des données quantifiées et interconnectées, dont la plupart sont invisibles, hautement imprévisibles et bouleversent la logique mathématique classique. Comme leur nature apparaît souvent métaphysique en raison de leur instabilité et de leur incertitude, l’auteur propose une méthodologie de type transdisciplinaire adaptée aux problèmes actuels.

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Dans la rubrique « Variations », Mariana Thiériot Loisel expose sa conception de la méthode transdisciplinaire, dont la vertu est notamment d’équilibrer science et conscience, vie et sens, écologie et économie, technologies et sagesses, enseignement et démocratie. Elle se doit pour cette raison d’être collaboratrice et de favoriser les valeurs collectives les plus positives.

Nicole Morgan revient sur les écrits de Thomas More, dont elle rappelle qu’ils cachent derrière une honorable façade un humour rhétorique et philosophique qui le fait se moquer des prêcheurs de vérité, où il se place lui-même, en un dernier clin d’œil.

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Dans la rubrique « Débats », Pierre Calame souligne la pertinence du projet européen, en l’absence de toute construction prévisible d’une gouvernance mondiale ou d’un Etat fédéral. Les appareils interétatiques et civils peuvent voir dans l’UE, naguère inimaginable, la préfiguration d’une gouvernance élargie.

On trouvera enfin le compte-rendu de la première Assemblée générale, tenue en virtuel à Dakar le 9 avril 2024, de l’association récemment créée I-Dialogos. Présidée par Abdoulaye Sene, elle a réuni près de 60 participants de 37 pays sur différents continents.

Paul Ghils

A propos de l'auteur :

Docteur en philosophie, linguiste et internationaliste, professeur émérite à l’Institut supérieur de traducteurs et interprètes, Université libre de Bruxelles, a enseigné en Algérie, au Gabon, au Mexique, en Iran et en Belgique. Ancien rédacteur d’Associations transnationales de l’Union des associations internationales (UAI), il a créé la revue de cosmopolitique Cosmopolis en 2007 et publié de nombreuses études à l’intersection de la philosophie, des sciences du langage et des sciences politiques. Il dirige la banque de données terminologiques et notionnaires portant sur divers sous-domaines des relations internationales hébergée par l’Observatoire européen du plurilinguisme (OEP).